Fast Facts: Je veux juste vivre dans un lieu decent:

l'histoire de {Jos}
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November 5, 2009

 Le Centre canadien de politiques alternatives — Manitoba (CCPA-Manitoba) a beaucoup publié sur les questions de pauvreté et d’itinérance. Malheureusement, le problème semble s'aggraver au lieu de s'améliorer, car le taux d'inoccupation n'a jamais été aussi bas dans les villes du Manitoba. À Brandon, ce taux est actuellement de 0,1 %, à Winnipeg de 0,9 % et à Thompson de 0,2 %.

La demande de logements locatifs entraîne l’augmentation du coût des loyers, car beaucoup de propriétaires font des rénovations, ce qui leur accorde le droit d'augmenter les loyers au-delà des lignes directrices, en vertu de la Loi sur la location à usage d’habitation. Étant donné que les allocations de loyer de l'aide sociale n'ont pas suivi le rythme des augmentations de coût des loyers, beaucoup de particuliers et de familles doivent payer le loyer avec leur allocation alimentaire et, en conséquence, doivent faire appel aux banques d'alimentation et aux soupes populaires.

Le CCPA entre régulièrement en communication avec des personnes pauvres dont la situation se détériore à cause du manque de logements. Certaines de ces personnes communiquent avec nous pour faire connaître leur histoire. Le récit suivant n'est qu'un cas parmi beaucoup d'autres.

Vers la fin de l'automne 2008, « Jos », qui habite le quartier West Broadway, reçoit un avis d'augmentation de loyer de 60 %. Son loyer passe de 330 $ à 550 $. Jos souffre d'un trouble bipolaire. Il reçoit une allocation de 285 $ pour le logement du Programme d'aide à l'emploi et au revenu (PAER), plus un supplément de 35 $ accordé aux bénéficiaires du PAER ayant des incapacités. Cette somme couvrait le loyer jusqu'à ce que celui-ci augmente. Jos estime que l'augmentation est beaucoup trop élevée et exerce son droit d'appel. La Direction de la location à usage d'habitation rejette son appel. Le coût du loyer est maintenant bien au-dessus de ses moyens et il cherche désespérément à trouver un autre endroit où se loger. La situation de Jos est assez courante dans son quartier où l'embourgeoisement a eu comme conséquence de déplacer un bon nombre de résidants à faible revenu de longue date.

Le 21 mai, le gouvernement du Manitoba annonce son projet intitulé Le logement d'abord : une stratégie contre le sans-abrisme qui prévoit l’aménagement de « 285 logements supplémentaires pour personnes ayant des problèmes de santé mentale ». On ne sait trop quand commencera la construction des nouveaux logements. Espérons que ce sera très bientôt, car le besoin est criant. Entre-temps, Jos continue de chercher un endroit où s’installer.

Voici comment il décrit sa vie en situation de pauvreté et sans chez-soi.

Mon revenu brut annuel est de 9 667 $. Après le paiement des dépenses, il me reste 2 703 $. C'est 225 $ par mois pour tout payer : la nourriture, l’autobus, les vêtements, les articles de toilette et la lessive… Tout. Je demeure dans mon appartement depuis 3 ans. Je me sens en sécurité et confortable là. Mais l'augmentation du loyer me force à chercher un autre endroit où vivre. Il n'y a rien de libre. On me dit que le taux d'inoccupation est de 1 %. Le ministère du Logement me dit qu'il faut attendre un an pour un logement social.

Quand on est pauvre, on n'a pas le choix. Je déteste ne pas avoir de choix et être obligé de quêter dans la rue. Avoir des choix c’est avoir de la fierté, de la dignité, de l'estime de soi, de la maîtrise de soi et de la confiance. Mais cela disparaît si on est forcé d’avoir recours aux banques alimentaires et de faire la queue à la soupe populaire tous les jours… d'être obligé de manger ce qu’on nous sert sans pouvoir demander ce qu'on veut manger, ni quand, ni où… en compagnie d'étrangers ou dans l'intimité de son chez-soi. À cause de ma maladie mentale, je me rends compte que le fait de manger dans une pièce remplie d'étrangers crée de l’anxiété… et je n’ai pas besoin de ça. Je suis anxieux quand je me trouve dans une salle remplie de parfaits inconnus et dont les murs sont placardés de citations et d’hymnes religieux qui ne m'intéressent pas… pour un repas qui n’est pas à mon goût et que je n’aime pas. Je ne pense pas que je devrais être exposé aux croyances d'autres personnes parce que j'ai besoin de manger. Mais chaque cent que je reçois de l'Aide à l'emploi et au revenu sert à payer mon loyer. Il ne reste rien. Je n'ai pas le choix.

Je sais bien que les gens donnent de l'argent aux banques alimentaires et aux soupes populaires parce qu'ils veulent aider. Mais pour m'aider réellement, il faudrait m'assurer un revenu suffisant pour pouvoir choisir où je vis et ce que je mange.

Vivre dans la pauvreté, c'est vivre dans la crainte et dans des conditions incertaines à longueur de jour. Je hais la pauvreté... Je la hais. Je déteste avoir à me soucier d'où proviendra mon prochain repas et ne pas pouvoir dormir parce que je crains l'aurore d'un autre jour… Rien ne change.

Je hais cela quand des gens me catégorisent, puis veulent me changer et me couler dans un moule qui ne me convient pas au lieu de m'accepter comme je suis.

Je hais cela quand ma famille et mes amis m'ignorent et me traitent comme si je ne faisais pas partie du monde parce que j'ai une maladie mentale et que je reçois de l'aide sociale.

Je hais cela quand ma dignité est minée et que ma fierté est bafouée en échange d'un repas dans un endroit où je ne veux pas me trouver. Je hais voir d'autres personnes souffrir, être fatiguées, usées et dans la douleur… frustrées de leurs droits fondamentaux à la nourriture et au logement. « Ils » s'attendent à ce que nous vivions là où ils ne voudraient pas vivre : une maison de chambres peu sûre ou carrément dangereuse, ou dans la rue. Ils s'attendent à ce que nous dépensions toute notre énergie dans la quête incessante …de la file à une soupe populaire jusqu’au refuge… et vice-versa.

Mais ce n'est pas réellement de la haine que je ressens. Je suis blessé. Très profondément blessé… que des personnes comme moi, des pauvres, soient maltraitées et malmenées verbalement, physiquement et mentalement, et forcées de vivre dans de si terribles conditions, parce que les gens considèrent que nous ne méritons pas mieux. Je veux simplement vivre dans un endroit décent. Je veux seulement pouvoir acheter mes propres aliments, et manger ce que je veux quand j'ai faim.

Jos a raconté cette histoire à Mme Shauna MacKinnon, CCPAManitoba. Jos a vécu la plus grande partie de sa vie à Winnipeg. Il vit actuellement dans le quartier West Broadway.

 

 

 

 

 

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